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LE FINANCEMENT DU PLAN DE DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES EN QUESTION
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La réforme de la formation qui fête son premier anniversaire repose notamment sur deux axes concomitants :

L’obligation pour l’entreprise de former ses collaborateurs

La nécessité pour tout actif de gérer son « capital compétences »

 

Cette réforme d’inspiration libérale a éliminé l’obligation minimale de dépenses de formation qui pesait sur les entreprises (0,9% de la masse salariale) et, dans le même temps, a positionné l’actif en potentiel « consommateur – client » de prestations de formation.

 

Cette nouvelle donne s’impose aux responsables formation des entreprises qui ne peuvent bénéficier de fonds mutualisés de leur OPCO pour financer des dépenses de formation (les structures de plus de 50 salariés alors qu’avant cette possibilité était offerte aux entreprises jusqu’à 300 salariés). Face à un management soucieux de développer la rentabilité, la productivité bref les performances (souvent à court terme), comment argumenter et bénéficier d’un budget d’investissement formation qui permette de lancer des actions autres que celles qui répondent aux obligations légales ou à la simple adaptation au poste de travail ?

 

Car désormais l’euro investi en formation peut être concurrencé par l’euro dépensé en rémunération, en avantages en nature,  en conditions de travail ou en « bien être au travail ». Comment sera perçu  l’objectif de l’entreprise ? Quels seront les résultats de cet investissement ? Contribuera-t-il à renforcer la « marque employeur » ? Sera-t-il un facteur de fidélisation des salariés ? C’est à ce type de questions que va devoir répondre le responsable de formation pour défendre un plan de développement des compétences pragmatique.

 

Les outils qu’il va devoir utiliser se nomment intelligence économique (benchmarking),  marketing social,  management de l’innovation et  gestion stratégique du capital humain. Sur ces questions, l’OPCO est il en mesure d’aider les entreprises ? Rien n’est moins sûr. Sa vocation est d’apporter des conseils aux TPE ce qui est déjà un objectif ambitieux (et coûteux !).

 

Il importera aussi de trouver des solutions pédagogiques moins coûteuses en temps (distanciel, formation en situation de travail…).

 

Ce sont sans doute ces réflexions  qui ont amené l’ANDRH (Association nationales des DRH) à entamer un dialogue avec le Ministère du Travail pour essayer de « décoincer » ce qu’elle pense être deux « verrous » du CPF (1) :

 

La liberté pour le salarié de mobiliser ou non son CPF pour une formation décidée par son entreprise

La nécessité que la formation soit certifiante ou qualifiante pour être éligible au CPF

 

Aux travers d’accords d’entreprise, l’ANDRH réclame « Primo, la création d’accords collectifs pouvant imposer aux salariés un usage de leur CPF. Ce type d’accords rappelle ceux de « performance collective », qui priment sur le contrat de travail. Leur création suppose sans doute une intervention du législateur. Secundo, la possibilité de mobiliser le CPF au-delà des seules formations diplômantes ou qualifiantes ».

 

Que faut-il penser de cette démarche ?

Il nous semble en premier lieu que si le ministère donnait suite (via des décisions de France Compétences par exemple) ; ce serait la remise en question de l’équilibre posé par les deux axes de la réforme pré cités avec les conséquences suivantes :

 

Une forme de confiscation potentielle des droits du CPF par l’employeur au bénéfice de formations du plan

Une ouverture des formations CPF vers des actions de format court, bref à des réponses aux besoins ponctuels sans soucis de qualification des bénéficiaires

Une sorte d’abondement obligatoire du salarié aux formations décidées par son employeur alors qu’il est envisagé que l’entreprise puisse abonder les formations qui sont décidées par le salarié

Une gestion collective et systématique de la co construction des formations alors que l’esprit de la loi est d’envisager des réponses individualisées lors de l’entretien professionnel

 

Deuxième point, cette revendication s’appuie sur le fait que le CPF est condamné à l’échec s’il n’est pas encouragé par l’employeur : « ce sont les directions des RH qui poussent les salariés à se former ». Sur ce point, il est utile d’observer qu’aucune campagne de communication d’envergure n’a été réalisée pour promouvoir-en leur temps- le CIF ou le DIF. Le Ministère a annoncé une campagne offensive et diversifiée en fin d’année qui suivra la mise en mains de l’appli mobile. Les effets devraient être visibles dès 2020 ce d’autant que les organismes de formation auront eux-mêmes intérêt à communiquer vers le « grand public » ce qui n’était pas leur axe jusqu’à présent.

 

En fait, la proposition de l’ANDRH repose sur une volonté de retrouver un budget formation à travers l’épargne CPF. Elle induit que si l’entreprise échappe aux contributions obligatoires, elle ne fera plus de formation. Vision pessimiste qu’ont de leur mission les DRH alors que les dirigeants d’entreprises sont de plus en plus conscients du potentiel que représentent les ressources humaines.

 

A ce titre il faut saluer la position plus optimiste et constructive de la CPME  (Confédération des petites et moyennes entreprises) qui, tout en saluant les apports positifs de la réforme défend l’idée d’inscrire les investissements de formation liés à leur transformation digitale à l’actif des entreprises (2). « Cette mesure comptable permettrait d’amortir ces dépenses et de valoriser leur bilan auprès des banques. En outre, ce coup de pouce serait particulièrement bienvenu pour les entreprises 50 salariés et 300 salariés.  En effet, ces dernières ont perdu, avec la réforme, l’accès aux fonds mutualisés pour leur plan de développement des compétences à un moment pourtant clé de transformation de leur organisation ».

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