De la création du nouveau centre de formation à Strasbourg à la généralisation à tous les projets de construction, en passant par son intégration aux formations, suivez la transition des Compagnons du Devoir vers le BIM avec Nicolas Henry, chargé de proje
Focus sur l'une des plus belles prestigieuses institutions françaises de l'apprentissage dans le bâtiment : Les Compagnons du Devoir.
Les Compagnons du Devoir ont entrepris leur transition vers le BIM. Et cette démarche mérite toute notre attention. Car finalement, elle impactera tous les corps de métier, y compris les plus traditionnels au sein des apprentis du Tour de France.
En partant de la création du futur Centre de Formation de Strasbourg vers sa généralisation à tous les projets neufs ainsi qu'aux formations dispensées aux apprenants, nous verrons comment se déroule cette transition vers le BIM, avec ses facilités et ses aléas. Instaurer le BIM tant dans les phases construction qu'en GEM : tel est l'objectif fixé.
Un dossier réaliste et passionnant, qui nous plonge dans les étapes d'une transition numérique au sein d'une structure d'envergure nationale.
Comment s'est déroulée cette transition vers le BIM ? Quel a été l'élément déclencheur ? Pour quels objectifs ? Est-ce que cela fut facile ?
C'est Nicolas Henry, chargé de projet BIM au sein des Compagnons du Devoir qui répond à nos questions pour ce premier volet.
Quel a été l'élément déclencheur du passage au BIM chez les Compagnons du Devoir ?
Notre association Ouvrière des Compagnons du Devoir regroupe, à ce jour, environ 280 000m² de bâtiment, avec notamment environ 135 sites principaux, dont la majeure partie est classée en ERP. Un patrimoine de plus en plus complexe à entretenir au vu des réglementations qui ne cessent de s'accumuler avec le temps et du volet maîtrise de l'énergie qui devient de plus en plus précieux avec nos objectifs de développement durable. Certains de nos bâtiments ne sont plus appropriés à nos objectifs d'accueil et de développement. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons décidé de gérer nos projets sous processus BIM, tant pour la construction d'un nouveau Centre de Formation à Strasbourg, que pour l'ensemble de nos projets neufs. L'objectif est d'optimiser la conception, l'exécution, mais aussi l'exploitation maintenance. Le projet de réaliser notre première construction sous processus BIM a été néanmoins poussé par Hervé POINTILLART, délégué régional Grand Est : Alors jury à un examen niveau licence, un étudiant a présenté son mémoire avec pour thématique le BIM, Hervé POINTILLART s'est alors dit que c'était, sans hésiter, le processus qu'il fallait mettre en application pour notre projet de construction d'un futur Centre de formation à Strasbourg.
Comment s'est déroulé ce passage au BIM chez les Compagnons du Devoir ?
Le passage au processus BIM s'est déroulé de manière assez brute, suite à la volonté d'Hervé POINTILLART de réaliser la future construction sous processus BIM. Après validation par notre conseil et par Vincent BRAZEAU, Directeur de notre service patrimoine, un recrutement a été lancé afin de trouver un chargé de projet avec des connaissances en BIM, c'est à ce moment-là que j'ai pu être embauché et déployer ce processus au sein du projet de construction du futur Centre de formation de Strasbourg qui est le premier projet test. Avec Manuel PORCHET, Adjoint au directeur du service patrimoine, nous avons travaillé ensemble au plus tôt lors du lancement de ce processus afin de rédiger et déployer les premières chartes de ce processus (Charte graphique, charte de codification, convention BIM…).
Quels sont les objectifs de cette transition ? Pour répondre à quels besoins et quels objectifs globaux ?
Les objectifs de cette transition nous sont très clairs et pour définir ces objectifs en interne, nous avons déjà commencé par lister nos difficultés. Dans notre quotidien, ce qui nous est sûrement le plus chronophage, le plus coûteux, mais néanmoins le plus important c'est l'exploitation maintenance de nos sites. Les données peuvent varier selon les sources, mais il est fléché en moyenne que le coût global d'un bâtiment est de 25% en coût de construction et de 75% en coût d'exploitation, maintenance, puis fin de vie (destruction).
Pour mener à bien cette exploitation-maintenance, ou parfois mise aux normes d'un de nos sites, nous sommes constamment à la recherche d'infos sur le bâtiment en question. Et c'est là que le bât blesse avec bien souvent des DOE rendus pas à jour, des documents manquants, certains en papier, certains en numérique, d'autre disparus…
Objectif 1 : Mieux gérer l'exploitation-maintenance
Notre premier objectif est donc mieux gérer notre exploitation-maintenance via maquette numérique, GED et GMAO, ce qui nous permettra notamment de mieux maîtriser les coûts liés à l'exploitation, l'appréhension des mises aux normes, la programmation des rénovations… (En bref…Maîtriser notre patrimoine et ne plus le subir !)
Objectif 2 : Maîtriser la conception
Autre objectif tout aussi important, celui de mieux maîtriser la conception et l'exécution de nos constructions. Côté conception, nos maisons sont constituées d'ateliers, de services administratifs, d'hébergements, de cuisines…
Nos sites sont soumis à un rythme acharné, un public de tout âge, des apprenants, des salariés, des va et vient, via ce que l'on appelle chez nous le changement de ville… Autant d'activités, de publics mélangés et diversifiés font que ce volet conception est très important afin que chacun se sente comme chez soi. C'est l'esprit qui doit résider chez nous ''La Maison''. Et cela n'est parfois pas facile à allier avec nos objectifs que nous portons au niveau de la santé et sécurité, et normes en vigueur liées à un ERP.
La conception sous processus BIM via maquette numérique et visite virtuelle est un atout incomparable à toute méthode de travail conventionnelle pour mettre en adéquation les objectifs cités ci-dessus. Pour le projet de Strasbourg, nous avons notamment lancé la phase concours en processus BIM. Une maquette numérique était attendue pour la sélection de l'architecte et groupement lauréat. Rien que le fait d'avoir une maquette numérique où nous avons pu nous balader dedans dès la phase concours, nous a beaucoup aidé à mieux appréhender et assimiler les projets et schémas fonctionnels du bâtiment qui nous ont été présentés.
Objectif 3 : Optimiser la phase exécution
Vient l'objectif de l'exécution, là aussi très important, en moyenne nous avons entre 2% à 4% de travaux supplémentaires sur ce type de projet géré de manière classique. Pour notre futur centre de formation de Strasbourg, nous avons fixé l'objectif de TS (Aléas de chantier) à 1%. Pour y parvenir, nous avons notamment lancé les études de synthèse (et non pré-synthèse) dès la phase APD du projet. Outre l'aspect économique, nous avons pour objectif en exécution une meilleure compréhension des plans par chacun des lots, nous testons également le volet appréhension des risques et sécurité des ouvriers, des futurs salariés et des apprenants, en relation avec la CARSAT et L'OPPBTP.
Pour terminer sur les objectifs, le travail réalisé sous processus BIM au sein de nos chantiers servira et sert déjà de base tant pour nos formations que pour nos apprenants. Aujourd'hui, la manipulation et interrogation d'une maquette numérique BIM sont demandées à certaines épreuves du CAP/BEP. Il nous semble imparable de mettre en application ce que nous enseignons dans nos centres de formation.